A l’orée de nouveaux chemins de vie…
Le syndrome de « la famille Koh Lanta »
Un an et demi, c’est le temps qu’il m’a fallu pour mettre des mots sur les bouleversements qui ont eu lieu dans nos vies. Oui, déjà un an et demi depuis mon dernier article dans lequel que je vous parlais de mes pérégrinations et expérimentations en solo pour mes mes 40 ans…
Ça me paraît si loin… Une autre vie !
Les mots qui suivent ont été écrits il y a plusieurs mois, mais pris dans le tumulte de nos existences, je n’ai pas forcément eu le temps ni l'envie de les continuer… J’ai repris ce texte début janvier 2020, en cette période où de nombreux blogueurs font des bilans sur leurs voyages, leurs rêves ou leurs idéaux, mais le cœur n’y était pas…. J’ai essayé à nouveau pendant le 1er confinement, mais une fois de plus, j’ai tout effacé, las de ne pas trouver les bons mots. J’ai ensuite pris la route avec le van, préférant oublier cet article et profiter du moment présent et des grandes vacances avec mes petits loups et ma chérie.
Mais finalement, avec cette nouvelle rentrée scolaire, le second confinement, et Noël qui approche, je me suis dit qu’il était enfin temps de me faire « violence » et de poser par écrit un peu de notre histoire, même maladroitement, afin de vous donner quelques nouvelles de notre tribu et peut être aussi clôturer un chapitre auprès de vous tous et pas seulement de nos amis proches…
Pour le coup, cet article encore très personnel, ne parlera pas de voyage comme vous pourriez vous y attendre, mais des évènements qui ont bouleversé notre famille, qui ne sera désormais plus exactement la même qu’avant.
Rentrée scolaires 2020 sous le beau soleil de haute Savoie
Laissez moi commencer par une petite anecdote. La famille Koh-Lanta, c’est le surnom que la directrice d’école de Loulou nous avait donné après notre tour du monde. Elle nous l’a avoué quand nous lui avons annoncé que Loulou quittait l’école au cours de l’année dernière, afin d’aller s’installer à la campagne… C’est à ce moment-là qu’elle nous a dit : « Cela ne m’étonne pas de vous « la famille Koh-Lanta », avec tous vos voyages et vos envies d’ailleurs ! Cela nous attriste forcément de voir Louanne quitter notre établissement, mais vous avez raison, les enfants seront sûrement mieux là-bas, loin de notre 93 »…
Ce qu’elle ne savait pas, c’est que cette page qui se tournait géographiquement parlant, marquait aussi définitivement la fin d’une belle histoire d’amour de presque 20 ans…
Ralentir, se rapprocher de la nature, changer de vie…. Bref, quitter le 93
En 2014, notre tour du monde en famille a été pour nous « une révélation ». Et quand bébé Max est arrivé en 2017, au retour de notre périple de 3 mois en Polynésie, nous avons vraiment pris conscience que les inégalités insupportables qui régissent notre société n’étaient pas prêtes de disparaître; que l’homme, aveuglé par l’illusion d’une croissance infinie, continuerait à surexploiter les ressources de notre terre jusqu’à épuisement, et surtout que les bouleversements inéluctables de nos écosystèmes nous conduiraient à coup sûr vers un effondrement global de notre civilisation. Quelle claque !...
Dans notre article « Un Road trip familiale en quête de sens », nous retracions un peu notre parcours de vie, pré et post tour du monde, comment nos rencontres et nos recherches avaient nourri nos réflexions. Nous commencions alors déjà à partager avec vous nos idéaux et envies profonds de changements de vie…
Ce périple en van tous les quatre a été extrêmement riche et inspirant à plus d’un titre : vie collective, autonomie, éducation des enfants, résilience… Et même si celui-ci s’est fini prématurément à cause de la casse moteur de notre vieux combi en Ardèche, cette envie de changements semblait s’être définitivement ancrée dans nos esprits et dans nos cœurs.
A notre retour chez nous, c’est la scolarité de Lou qui a été l’élément déclencheur de notre volonté de quitter la Seine-Saint-Denis. En effet, malgré toute la bonne volonté de l’équipe enseignante de son école, nous trouvions que le niveau scolaire ne lui permettait plus de progresser correctement et que son environnement global au quotidien ne convenait plus à une petite fille aussi sensible. Nous avions aussi peur d’en ressentir rapidement les effets sur Max.
En quasiment 12 ans de vie dans notre petite ville d’adoption du nord de Paris, nous avions pourtant tissé des liens forts avec nos voisins, les autres parents d’élèves ou ces habitants formidables investis dans l’éducation de leurs enfants ou dans le bien de la communauté. Mais globalement, et sans rentrer dans de longues polémiques, la gestion foireuse des banlieues par les pouvoirs publics depuis des décennies avait eu raison de notre enthousiasme, de nos espoirs et de notre combativité… Il était plus que temps de partir !
Petite photo de famille des gens qui ont compté pour nous dans notre ville
Alors, quand d’une façon impromptue, il y eu l’opportunité de pouvoir changer les enfants d’environnement, malgré la douleur, nous l’avons saisie. Enfin, Vanessa l’a saisie, et moi, je l’ai accepté tant bien que mal pour leur bien à eux…
Mais plus de 600km allaient nous séparer désormais.
Amour, séparation et renouveau…
Depuis notre enfance, à grands coups de conte de fées, de dessins animés de princes et princesses, ou de films d’amour un peu mièvres, on nourrit notre imaginaire que l'amour et le couple peuvent durer jusqu'à la fin de nos vies… C’est beau et idyllique d’une certaine façon. Et même Vanessa et moi, pourtant assez « anti-conformistes sur le couple », nous en rêvions sûrement un peu inconsciemment… Mais force est de constater que dans la vraie vie, il n'est pas aisé de finir ses jours avec la même personne, et ce, malgré tout l'amour que l'on se porte.
D’aussi loin que je m’en rappelle, on s’est aimé fort avec Vanessa. De nos 20 ans à maintenant, nous avons fait les 400 coups ensemble et surtout, nous avons grandi et évolué côte à côte pendant toutes ces folles années. Nous avons fait un, puis deux beaux enfants, sans parler de notre fabuleux tour du monde en famille en 2014.
Mais malgré toutes ces chouettes aventures vécues main dans la main, tous ces bons moments de bonheurs, nos forts caractères et nos évolutions personnelles ont été la cause d’innombrables disputes… Alors, doucement, avec le temps, nous nous sommes éloignés l’un de l’autre et les petites rancœurs accumulées du passé ont pris le dessus sur l’amour qui semblait encore subsister entre nous.
De bas en haut : 2005, équipiers sur un voilier pour rejoindre Malte // 2007, découverte de Pékin en marge de notre voyage en Corée du Sud // 2010 : Trek dans le désert Marocain...
Nous avons connu de nombreux hauts et bas, nous nous sommes séparés à plusieurs reprises, nous avons tenté plus d’une fois de sauver notre couple et notre famille… Mais pendant que nous publiions sur les réseaux sociaux des images de « petite famille loufoque presque parfaite », l’envers de notre quotidien était hélas loin de l’image que nous essayions de donner alors. Nous allions d’échecs en échecs jusqu’au jour où un point de non-retour a été franchi.
Il était temps de se rendre à l’évidence et de faire une croix définitive sur une vie de famille « normale et réussie »…Nous avions désormais un nouveau défi à relever : préserver au maximum nos enfants, rebondir en conservant nos valeurs, nos idéaux et peut-être réussir le pari d’une famille recomposée aimante et bienveillante…
Comme Vanessa l’a dit assez justement à Loulou quand nous lui avons annoncé notre séparation : « nous ne sommes plus un couple, mais nous resterons une famille pour toujours »…
Dernière photo "de nous 4" datant de Juillet 2019
Même si les premiers mois ont été difficiles, mêlés d’incompréhensions, d’imprévus, de fatigue et de doutes sur le chemin à prendre pour nos reconstructions respectives, nous rêvons bien sûr de bonne entente, d’apaisement et de respect mutuel dans nos nouvelles vies.
Et force est de croire que la roue tourne toujours ! Car quelques mois plus tard, la vie nous réservait de "belles surprises" à Vaness’ et moi-même, nous permettant de surmonter plus facilement le cap de cette séparation et de mettre à nouveau une petite touche d’amour frais dans nos vies à tous les deux.
En effet, durant l’été 2019, alors que je sillonnais les routes sinueuses des Hautes-Alpes en van, avec les enfants, Vanessa, citadine de toujours, participait à son 1er stage de survie en pleine nature et tomba sous le charme de son instructeur entre deux leçons pour apprendre à faire un feu ou à purifier de l’eau croupie.
De mon côté, c’est en participant à la course en auto-stop, la «Mad Jacques» que je croisais la route d’une petite blogueuse (mais grande voyageuse) qui chamboula de manière impromptue mon petit cœur…
Quelques mois après ces rencontres inattendues, un peu comme "un pari fou" nous passions notre 1er Noël tous ensemble à la campagne en mode "famille recomposée" avec nos petits, nos mamans et nos nouveaux conjoints respectifs....
Je ne sais pas demain de quoi l'avenir sera fait pour ces deux nouveaux couples que nous formons. Mais franchement, qu'est-ce que c'est bon d'aimer fort à nouveau. D'aimer sans passé, sans rancœur, d'aimer simplement en se découvrant au jour le jour et en essayant d’esquisser ensemble les tracés de nouveaux chemins de vie à partager...
Un an et demi après, ou en sommes nous alors ?
Vanessa eu le courage de quitter Paris et habite maintenant au plus proche de la nature, entre le lac Leman et le Mont Blanc où les enfants sont scolarisés dans une école paisible de sa commune. Elle a quitté son boulot dans le digital pour aider son nouveau compagnon à développer son activité de stages de survie et reste en parallèle consultante freelance en développement commercial.
De mon côté, notre séparation ayant chamboulé les plans que j’avais pour nous quatre, je suis encore un peu perdu sur la route à emprunter afin de rebondir au mieux tout en étant plus proche de mes petits loups et en adéquation avec mes convictions. J’ai de plus maintenant une petite femme adorable à ajouter à l’équation. Une femme de convictions qui elle aussi, après une carrière confortable toute tracée, a chamboulé sa vie et tout remis en cause, n’ayant plus vraiment foi en la société telle qu'on la connait. Un nouveau couple en plein questionnement donc…
Alors, pour le moment, je continue d’essayer de vivre de ma passion et malgré un contexte économique difficile, je poursuis mon activité de photographe d’entreprise avec « L’oeil témoin ». J’aimerais développer dans les semaines à venir, de nouvelles offres pour les particuliers et relancer aussi un projet qui me tenait à cœur et que j’avais mis de coté à cause de cette séparation : « Ma famille n’est pas cliché ! ».
Évidemment en parallèle, je pense à une future reconversion professionnelle : de nouveaux savoirs faire ou compétences à acquérir qui iraient dans le sens de mes envies ou de mes idéaux. Dans la construction écologique peut-être, le tourisme responsable, autour du bien être ou dans la création d’un projet avec un collectif.
Nous avançons doucement mais surement, ma chérie et moi. Par exemple, début Octobre nous avons participé avec enthousiasme au Festival Oasis, évènement qui réunissait plusieurs centaines de personnes autour de leurs rêves et de leurs expériences de vie collectives et écologiques. Et là, au moment ou je finalise cet article, nous partons assister à un séminaire d’une semaine autour de la CNV (communication non violente) aux cotés d’un homme plus qu’inspirant : Thomas d’Asembourg et son collectif bienveillant «d’intériorité et changement». A priori, je pense que ces expériences pourraient nous enrichir autant personnellement que professionnellement. Je vous en dirais surement plus par la suite...
Blog, voyages et avenir....
En 2013, sans rien y connaître, nous avons créé ce blog afin de partager avec vous nos aventures en famille autour du monde, promouvoir les ONG que nous allions rencontrer et surtout, vous inspirer et vous donner envie de vous lancer à votre tour. Le blog a plutôt bien fonctionné, nous sommes passés dans différents médias, et un peu comme dans mon ancien boulot dans la presse, nous avons été invités plus d'une fois à tester des destinations ou marques autour du voyage ou de l’éducation. Nous avons même fait une pub pour des albums photo qui nous a permis de nous offrir notre vieux combi VW. Mais malgré cela, nous n'avons jamais eu l’ambition comme bien d’autres, de vivre professionnellement de ce blog, ou d’en faire un vaste panneau publicitaire. Alors, durant ces 1 an et demi de pause et de recul sur les réseaux sociaux, j'ai longuement hésité à le reprendre en main et à y consacrer à nouveau temps et énergie. Et pourtant, c’était si bon d’avoir autant d’échanges et de faire de si belles rencontres grâce au blog… Mais quid de l’intérêt d’un blog de voyage quand on ne peut plus vraiment voyager ? Quid de l’intérêt d’un blog autour de la famille, quand celle-ci finit par éclater ?
LE VOYAGE ?
Entre le moment où j'ai commencé à écrire cet article, beaucoup d’évènements sont arrivés dans nos vies à tous et ce foutu coronavirus n'a fait que mettre un peu plus en lumière, un modèle de société exsangue et destructeur du vivant ne pouvant assurer correctement la survie de notre espèce à moyen et long terme. Alors, même si cela était possible, serait-il encore raisonnable de voyager comme avant après que « la nature » nous ait donné une telle leçon d’humilité ? Serait-il encore raisonnable de voyager comme avant avec notre prise de conscience autour de ce réchauffement climatique qui pourrait nous être fatal ?
Une amie à nous, Lucie, (ex) blogueuse voyage pro dont j’apprécie vraiment la plume, a résumé en 3 phrases dans son article, une grande partie de ma pensée à ce sujet :
"Comment promouvoir « une vie de rêve », quand elle contribue à la destruction lente et évidente de notre environnement ? Comment promouvoir le tourisme, alors qu’au fond de moi, je crois en l’effondrement et à une décroissance impérative, y compris dans le domaine du tourisme ?
Je pleure de gratitude en ayant eu la chance de voir le monde en toute insouciance, alors que nous n’avions pas l’impression que le destin de l’humanité pesait si lourdement sur nos chemins de vie personnels."
Franchement pour moi, tout est dit. Autour de nous, bien d’autres amis blogueurs voyageurs ont pris conscience de cela également et commencent à ré-organiser leur manière de vivre et voyager. Pour le coup, sans pour autant être totalement exemplaire, ces 3 dernières années, j’ai beaucoup moins pris l’avion et ai privilégié des voyages en France et en van surtout. C’est un mode de déplacement et un style de vie qui me plaît depuis 2015 et qui, au vu de la situation actuelle, risque d’être encore bien longtemps d’actualité.
LA FAMILLE ?
Au niveau de la famille, d’une façon optimiste, j’aime à croire qu’on pourrait continuer à partager ici avec vous l’histoire et les pérégrinations de vie de notre jolie famille recomposée en devenir : sa reconstruction, ses réflexions, ses expérimentations, ses choix de vie et d’une certaine manière, nos voyages intérieurs à tous dans un vaste monde en transformation… Je me rappelle que certaines de ces thématiques avaient suscité de l’intérêt chez bon nombre d’entre vous et franchement, continuer de partager et d’échanger ici me séduit encore.
Donc voilà, en conclusion, je serais tenté de dire que ce blog continuera de parler de voyages, mais de « voyages » sous toutes ses formes… Le voyage pour explorer, découvrir le monde, rencontrer les autres et s’inspirer…. Mais le voyage intérieur aussi, pour essayer de devenir meilleur, de trouver et donner du sens à sa vie et peut-être ainsi, participer plus activement à une transition nécessaire pour le bien-être de tous et l’avenir de nos enfants….
Alors, on garde le contact ?
©Arnaud
Pour les curieux, en plus du compte instagram du blog (letourdumondea80cm) nous partageons aussi photos et petits moments de vie ici : Arnaud (Ze pebble mood & pix) & Vanessa (en_route_ma_troupe)
Bravo pour cet article pas évident à écrire.
Écrire est une thérapie et je suis sûr que tu te sens mieux après l’avoir écrit.
L’idée de laisser la plume aux 2 cotés de la famille recomposée est séduisante je trouve. Il vous faudra peut-être retravailler un peu sa structure mais ce n’est pas cela qui va vous arrêter.
Bon courage en tous cas pour les nouvelles étapes à venir.
Bravo Arnaud pour cet introspection. Je comprends qu’il t’ait fallu du temps pour écrire cet article : c’est courageux ! J’espère que ces nouvelles routes vous apporteront du bonheur à toi et Vanessa, et que l’on aura de nouveau l’occasion de se croiser … À+